Dans le quartier chrétien, nous visitons l’archevêque Joseph-Jules Zerey, de l’Eglise melkite (c’est-à-dire une Eglise catholique qui a gardé le rite byzantin). La rencontre est immédiate :
« Notre division est contre nature, et le monde est en souffrance à cause de nous. Vous ne savez pas combien je souffre de cette division. J'ai soif d'unité et je prie chaque jour pour cela. Ma mère était orthodoxe et me soufflait à l’oreille : prions pour l’unité de l’Eglise ! »
Le peuple de Dieu ne comprend pas ces divisons. J.J. Zerey en voit la cause dans l’orgueil : « Ce sont nous, les responsables qui mettons des obstacles. Nous avons peur de l'histoire et de faire des pas. Jésus a été très dur contre l'orgueil, particulièrement des chefs religieux ».
Il rêve d’une célébration au Cénacle où tous les responsables invoquent ensemble l’Esprit Saint, ou encore au Golgotha, sans attributs épiscopaux et pieds nus !
La diversité des Eglises est belle, « comme un jardin avec tant de fleurs différentes », mais les responsables doivent davantage prier ensemble. Lorsque le pape François est venu à Jérusalem, il lui a dit « Il faut aimer l'Esprit Saint ». Mais il n’a pas eu le temps de lui dire le plus important : « Saint Esprit je t'aime » !
Les chrétiens de Jérusalem sont à peine entre 1% et 2%. Combien seront-ils en 2033 ? Pour préparer cet événement, il insiste sur la nécessité de la prière. Il faut que tous, responsables et peuple de Dieu, prient ensemble. « Avec tous, également avec les messianiques, ajoute-t-il. J’ai une grande affection pour eux » !
Nous nous rendons ensuite au monastère éthiopien pour visiter l’archevêque, près de la huitième station de la Via Dolorosa, mais celui-ci ne peut nous recevoir en ce moment. Son secrétaire nous introduit alors dans l’Eglise et nous explique à partir des fresques la longue histoire des éthiopiens à Jérusalem, en commençant par l’officier éthiopien baptisé par l’apôtre Philippe.
Être une présence créative
Après un repas dans un restaurant des souks, nous remontons vers le Patriarcat latin où nous attend Mgr Pierbaptista Pizzaballa. Ayant été « custode » des franciscains pendant plus de dix ans, il a été récemment nommé administrateur apostolique.
« C’est pas si loin, mais assez loin », s’exclame-t-il en découvrant JC 2033 ! « Cela permet de marcher ensemble. Ici nous sommes fatigués par les événements et les slogans. Un grand événement doit être la conclusion d'une marche, sinon il faut l’oublier ».
Avec Mgr Gianbaptista Pizzaballa
Il nous invite à nous poser quelques questions : Quel est le sens de la résurrection pour moi ? Pour notre communauté ? Qu'est ce que cela change dans nos relations? « Pour moi, dit-il, la résurrection signifie communauté vivante, espérance qui ne périt pas, appartenir au Christ et à son Corps. Aujourd'hui on parle de Jésus sans résurrection. C’est un Jésus humain et social, mais pas le Seigneur ressuscité qui dérange. En mettant au centre la perspective de la vie change ».
Il se rappelle que les festivités des deux milles ans de la naissance de Jésus étaient précédées par un temps important de préparation de trois ans, avec des demandes de pardon.
Pour préparer 2033, il faut, bien sûr, visiter et convaincre les leaders, mais surtout se demander ensemble, dans notre diversité, ce que veut l'Esprit Saint. Dans une première phase, il faudrait que toutes les Eglises réfléchissent sur le sens de la résurrection. Ensuite elles devraient le partager entre elles. Puis que les autorités de chaque Eglise en prennent connaissance.
« La jeunesse cherche là où il y a la vie. Ils ne la trouvent pas dans nos Eglises. C'est notre présence qui doit interpeller. Qu’en 2033, elles soient cette présence créative à travers notre témoignage de vie ! »
La croix fleurie
À l’issue de la messe dans la cathédrale arménienne Saint Jacques, je m’avance vers un prêtre pour recevoir le pain béni. « Martin » ? me demande le Père Emmanuel Atajanyan en me tendant un morceau de « lavash », le pain traditionnel arménien.
Après nous avoir expliqué l’histoire de la cathédrale et de son peuple à Jérusalem depuis les temps apostoliques, il nous entraîne à l’intérieur du quartier arménien jusqu’à l’auberge des pèlerins.
D’une voix douce, mais avec une grande autorité, il nous partage ses convictions sur l’unité chrétienne. Nous écoutons sans avoir besoin de poser de questions :
« Certes nous sommes orthodoxes et gardons la tradition, mais nous devons être ouverts à tous. Si nous n'aimons pas les autres chrétiens nous ne pouvons être disciples du Christ.
C'est à cause de mon péché que les gens ne croient pas. Nos Eglises sont souvent un show plus qu’une Eglise vivante, car elles ne se repentent pas et persistent dans leurs divisions.
Nous avons besoin de saints, de prophètes et d'apôtres pour que nous nous repentions vraiment.
La vraie vie en Christ est de vivre son humilité. En Lui nous pouvons être unis dans un vrai esprit. Mais beaucoup le trahissent. Dans l'Evangile il est dit que peu restèrent avec Lui. Qui est prêt à porter sa Croix et à le suivre jusqu'à la fin ? ».
Concernant « la grande tâche » de JC 2033, il nous dit combien il est heureux de voir que nous croyons en ce que nous faisons. Afin de ne pas être tentés par le diable, il nous encourage à prendre des temps de retraite dans des monastères.
« Je pense que nous devons rester en contact. Prions les uns avec les autres, nous pouvons collaborer ! Chaque année nous devons préparer 2033 »
Après trois heures d’entretien d’une grande intensité spirituelle et un temps de prière en commun, nous sortons dans le jardin du monastère où se dresse un Kashgar, une croix fleurie, symbole de l’Eglise arménienne apostolique. Avec un sourire lumineux le P. Emmanuel nous en explique le sens : la croix arborescente symbolise l’arbre de Vie du paradis, la communion avec Dieu dans laquelle le Christ nous fait entrer par sa mort et sa résurrection. Belle conclusion à une belle rencontre !